XWiki au banc de test
Il existe pléthore de produits pour faire un Wiki, tous plus complets les uns que les autres. Alors en quoi XWiki se démarque-t-il ?
XWiki, c’est bien plus qu’un wiki. (~~vous voila convaincus, non ?)
C’est en effet ce qui est crânement annoncé sur le site xwiki.org sous l’appellation “Wiki de seconde génération”. Alors, qu’il y a t’il derrière ce discours commercial ? La promesse d’un véritable couteau-suisse du Web ? Ou un n-ième et décevant CMS ?
Cas d’étude
Pour les besoin d’une démonstration, j’ai du mettre en place un portail Web minimaliste incluant les fonctionnalités suivantes :
- une page d’accueil
- un espace de partage de données publiques (nous allons y revenir)
- un blog sans workflow de validation (brouillon > publié)
- un forum simpliste (pas de messages privé)
Le tout en 2 semaines, mise en prod inclue.
L’occasion révée de tester XWiki, régulièrement promu par Vincent Massol dans son podcast les cast codeurs, et qui propose 3 des 2 fonctionnalités (le forum est un “plugin” nommé Bulletin board)
XWiki est écrit en Java, et utilise Spring, Hibernate/JPA, Struts, et Velocity. Il est personnalisable avec Groovy, Python, Ruby ou encore Php.
Qu’est ce qu’un Wiki 2ème génération ?
Alors si j’ai bien tout compris (à vous de vérifier donc :)), le Wiki de 2ème génération est un CMS.
XWiki (en version 3.2) propose effet tout ce qui caractérise un CMS :
- un portail Web qui présente du contenu éditorial, produit par plusieurs utilisateurs
- une séparation entre les données (contenues dans les Classes et les Objets) et leur présentation (utilisation de Velocity comme moteur de templating, et de CSS)
- une structuration du contenu : hiérarchisation, organisation en espaces plus ou moins spécialisés (espace forum, espace blog…)
- une véritable gestion des comptes utilisateurs et de leurs permissions sur l’ensemble des objets
- un versionning du contenu
En revanche, pas de workflow de publication, bien qu’il soit tout a fait possible d’en créer un.
Car ce qui différentie XWiki des autres produits de Wiki et CMS, c’est son extrème flexibilité. Du point de vue des utilisateurs privilégiés (le webmaster), XWiki n’est pas particulièrement facile à prendre en main. Il est en revanche très bien documenté Pour les développeurs (créateur de plugins et composants) c’est l’inverse : mal documenté, et extèmement puissant.
Le modèle de donnée XWiki
Dans XWiki, tout est “document”. Héritage naturel du Wiki.
Un document dispose à minima d’un nom unique (utilisé comme url), et d’un certain nombre de propriétés (clé-valeur typée String, nombre, date…).
Ces propriétés sont définis dans une Classe
, et les documents sont donc des Objets
, instances de ces classes.
En gros, si je veux définir un billet de blog, je crée une classe Blog avec 3 champs (auteur, contenu, date de publication), et pour chaque billet le système crée un Objet
ayant son url propre (/xwiki/bin/view/Blog/Mon+nom+de+billet
).
Sur chaque document, XWiki propose les actions suivantes :
edit
: création/mise à jour du documentview
: visualisationdelete
: suppression
Au niveau rendu, il est possible d’attacher à la classe un “Class Template” : c’est le formulaire qui permet de remplir les propriétés d’un document lors de l’action edit
.
On peux aussi attacher une “Class Sheet” : template Velocity pour le rendu (action view
) des Objets
.
Premier pas en temps que développeur
Très facile à installer (un war à déposer dans un conteneur Servlet), XWiki propose au développeur des fonctionnalités d’import/export, et de personnalisation en ligne.
Ainsi, avec les droits suffisants, et directement dans l’application, on crée et modifie Classes
et Objets
.
Le moteur de template Velocity est très facile à prendre en main, et j’ai choisis Groovy pour la “logique applicative” à l’intérieur des pages.
Groovy apporte toute la puissance d’un language dynamique à la plateforme Java, tirant partie des librairies existantes.
Tout ce passe donc à chaud, sans redémarrage. Très pratique. Par contre, on édite du code dans un textarea : aucune fonctionnalité d’IDE. Il existe cependant un plugin Eclipse pour combler ce manque.
Coté versionning, chaque sauvegarde provoque une nouvelle version de l’Object
, la Classe
, le Class Template
ou la Class Sheet
.
Donc il est possible de revenir en arrière lorsqu’on a cassé quelque chose.
La fonction d’export permet de faire un zip avec les modifications et configurations qu’on a apporté à son instance. Et naturellement, la fonction d’import permet de “déployer” son zip sur une autre instance.
Le développement spécifique
XWiki promet une grande facilité d’extension, permettant au développeur d’enrichir les fonctionnalités de base pour ajouter un fonctionnel spécifique.
Dans mon cas, je devais proposer à l’intérieur du portail les fonctionnalités de collecte et partage de données publiques. Le service sous-jacent est Smart Data, accessible via une API Http. Pour résumer :
- Une page pour uploader un fichier de données, et donner le nom et la description de la source de données
- Une page pour afficher et réaliser une recherche sur les sources de données existantes
- Une page pour visualiser le contenu d’une source de données (et télécharger le fichier original)
- Une page pour supprimer les sources de données
Tout cela est réalisé en invoquant l’API Http du service Web de Smart Data, qui répond en Json.
Il était possible de calquer le cycle de vie d’une DataSource sur une Classe
XWiki, et de personnaliser les actions edit
view
et delete
.
Toute la logique de médiation aurait été embarquée dans les pages.
J’ai préféré développer un “plugin” XWiki : un jar pour enrichir le fonctionnel, et encapsuler la logique de médiation. Les pages peuvent invoquer ensuite ces fonctionnalités sous la forme de “macro”. On obtient un meilleur découpage/découplage de la logique propre à Smart Data, et une meilleur testabilité (jar = projet maven = tests automatisés).
Ex: l’Object XWiki ViewDataSource (template Velocity)
## Appel au service de médiation : invoque la méthode get() pour récupérer le datasource sur Smart Data.
#set($dataSource = $services.distantDataSourceService.get($request.getParameter('id')))
<div class="sd-datasource">
<div class="sd-title">
## Utilisation de l'objet renvoyé :
<span class="sd-title">${dataSource.name}</span>
</div>
<div class="sd-content sd-tags">
#foreach($tag in $dataSource.tags)
<span class="sd-value sd-tag">$tag</span>
#end
</div>
<div class="sd-content sd-description">
<span class="sd-label">$msg.get('sd.labels.desc')</span>
<span class="sd-value">$!{dataSource.desc}</span>
</div>
</div>
Ex: l’interface DataSourceService (Groovy)
import org.xwiki.component.annotation.ComponentRole;
@ComponentRole
interface DataSourceService {
def get(id)
}
Ex: l’implémentation DistantDataSourceService (Groovy)
import javax.inject.Named
import javax.inject.Singleton
import org.xwiki.component.annotation.Component
import org.xwiki.component.phase.Initializable
@Singleton
@Component
@Named('distantDataSourceService')
class DistantDataSourceService implements DataSourceService, ScriptService {
def get(def id) {
def retrieved = null
// Retrieve the DataSource
http.request(GET, JSON) { req ->
uri.path = "api/datasources/$id"
response.success = { resp, json ->
retrieved = json
}
response.'500' = {
retrieved = null
}
response.failure = { resp, json ->
throw new Exception("Unable to retrieved DataSource (id $id) ${json.errors}");
}
}
return retrieved;
}
Le système est assez simple : le composant déclare un certain nombre de services (avec les annotations de la JSR-330), ainsi que les implémentations correspondantes. Ces services sont utilisables directement depuis les Object XWiki (injection de dépendances Spring).
Conclusion : bien ou quoi ?
XWiki se veut être un outil très flexible et très puissant, une plateforme pouvant supporter le développement de n’importe quel portail Web, quelque soit ses fonctionnalités. C’est pour le moins ambitieux.
Après avoir travaillé deux semaines avec, je suis assez tenté de dire que le pari est réussi.
Pour un développeur, la courbe d’apprentissage est minimale lorsqu’on connait Spring/Hibernate. Le modèle de donnée est simple. Velocity et Groovy sont des outils puissants et faciles à prendre en main. Pour moi, l’aggrégation de ces technologies est naturelle et à propos.
Maintenant, si j’ai pu atteindre mon objectif, ce ne fut pas sans grincements de dents. Et c’est principalement dû à la flexibilité de l’outil : il y a toujours 2 ou 3 manières de réaliser la même fonctionnalité. Parfois, on s’y perd un peu.
La documentation développeur est un gros point faible à mon sens. Enfin, les performances ne sont vraiment pas au niveau. Le temps de chargement d’une page est rédhibitoire pour un site à très fort traffic.
En conclusion, je suis assez conquis par XWiki, mais pas dans une optique “grosse production de gros site à gros traffic”. Etre productif en solo est facile, mais je ne suis pas aussi confiant dans le cadre d’une équipe d’une dizaine de personnes.
Si je peux donc émettre un conseil : essayez le, et n’hésitez pas à commenter pour donner votre avis !
Enfin, si vous voulez voir ce que cela donne en vrai, jetez un oeil à ce screencast :